Publié le 28 juin 2024

La sécurité routière à Montréal n’est pas qu’une affaire de courtoisie, mais un problème systémique de design urbain et de physique.

  • Les intersections les plus dangereuses sont souvent le résultat d’un aménagement qui crée des conflits inévitables entre usagers.
  • La cohabitation sécuritaire passe moins par le respect mutuel abstrait que par une compréhension concrète des angles morts, des infrastructures et de la vulnérabilité de chacun.

Recommandation : Adoptez une conscience situationnelle proactive pour identifier et anticiper les dangers créés par l’environnement urbain, plutôt que de simplement réagir aux erreurs des autres.

Le klaxon qui surprend, le vélo qui frôle, la portière qui s’ouvre sans crier gare… Chaque déplacement dans les rues de Montréal est devenu pour beaucoup une source de stress. Le débat public se cristallise souvent autour d’une opposition stérile : automobilistes contre cyclistes, piétons contre tout le monde. On s’invective, on s’accuse mutuellement d’incivilité et on appelle à un « meilleur partage de la route » sans vraiment savoir ce que cela implique. Les appels au respect mutuel, bien que nécessaires, semblent se perdre dans le vacarme de la circulation.

Mais si le cœur du problème n’était pas seulement l’incivilité individuelle, mais la conception même de nos rues ? Si l’environnement urbain, par son design, créait lui-même les conditions du conflit ? Cet article propose de changer de perspective. En tant qu’experts en urbanisme et en sécurité routière, nous soutenons que la cohabitation pacifique ne naît pas de la simple bonne volonté, mais d’une compréhension approfondie des failles systémiques de notre réseau. Il s’agit de décoder la **physique de la vulnérabilité** et la logique derrière le **design conflictuel** de certains aménagements.

Ce guide n’est donc pas un énième appel à la prudence. C’est un manuel de décryptage de l’espace public montréalais. Nous identifierons les points noirs non pas pour faire peur, mais pour les analyser. Nous expliquerons pourquoi la promesse d’une ville sans accident passe par une ingénierie de la cohabitation. Surtout, nous vous donnerons les clés pour développer une **conscience situationnelle proactive**, cet outil mental qui permet de naviguer en sécurité dans un système imparfait. Car avant d’être un automobiliste, un cycliste ou un piéton, vous êtes un usager cherchant à arriver à destination sain et sauf.

Pour vous guider à travers cette analyse complète, cet article est structuré pour aborder chaque facette du problème, des zones à risque aux solutions concrètes pour chaque usager.

La carte des points noirs : voici les intersections les plus dangereuses de Montréal pour les piétons et cyclistes

Loin d’être une fatalité, l’insécurité routière à Montréal possède une géographie précise. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : selon le rapport annuel du SPVM, on a recensé 643 collisions impliquant des cyclistes en 2023, une augmentation de 14% par rapport à l’année précédente. Ces incidents ne sont pas répartis au hasard; ils se concentrent sur des « points noirs », des carrefours dont le design même semble programmer le conflit. Une récente étude menée par des chercheurs de l’Université McGill a mis en lumière ces zones de friction en sondant 1500 cyclistes montréalais.

Le verdict est sans appel : l’intersection des rues Ontario et Berri est perçue comme la plus dangereuse, suivie de près par le carrefour du parc et du Mont-Royal. Le point commun de ces lieux ? Ce sont de larges artères, comptant souvent quatre voies de circulation motorisée ou plus, où les infrastructures cyclables sont soit absentes, soit mal intégrées. Ce **design conflictuel** force les usagers les plus vulnérables à naviguer dans des flux rapides et complexes, augmentant drastiquement le risque de collision. Il ne s’agit pas d’une simple perception, mais d’une réalité structurelle où les trajectoires sont vouées à se croiser dangereusement.

L’identification de ces points noirs n’a pas pour but de créer la peur, mais d’objectiver le problème. Ce sont des études de cas à ciel ouvert qui démontrent l’urgence de repenser nos carrefours. Comme le souligne Hisham Negm, doctorant à l’École d’urbanisme de McGill et co-auteur de l’étude :

Les intersections sont les zones les plus vulnérables pour les collisions impliquant des cyclistes, des piétons et des voitures. Celles mises en évidence dans ce sondage doivent être redessinées pour améliorer la sécurité et le confort de tous.

– Hisham Negm, École d’urbanisme de McGill

Cette analyse met en évidence que la sécurité n’est pas qu’une affaire de comportement individuel, mais avant tout une question d’aménagement du territoire. Un carrefour bien pensé guide les comportements et réduit les risques à la source.

« Vision Zéro accident » : la promesse de Montréal est-elle tenable ?

Face à l’augmentation des accidents, Montréal a adopté, comme de nombreuses métropoles mondiales, la philosophie « Vision Zéro ». Le nom est ambitieux et souvent mal interprété. Il ne s’agit pas de la promesse utopique qu’il n’y aura plus jamais le moindre accrochage, mais d’un changement radical de paradigme : le système routier doit être conçu de telle manière que **les erreurs humaines inévitables n’entraînent ni décès ni blessure grave**. En d’autres termes, la responsabilité n’incombe plus uniquement à l’usager, mais au système lui-même.

Cette approche, originaire de Suède, repose sur un principe éthique simple : la vie humaine prime sur la fluidité du trafic ou le gain de temps. Cela se traduit par des interventions concrètes relevant de ce que nous appelons **l’ingénierie de la cohabitation** : réduction des limites de vitesse, réaménagement des intersections pour séparer physiquement les flux (piétons, vélos, voitures), ajout de phases de feux protégées, ou encore la création de saillies de trottoir qui réduisent la distance de traversée pour les piétons. L’idée est de construire un environnement qui « pardonne » les erreurs.

Aménagement d'une intersection sécurisée avec phases protégées for piétons et cyclistes à Montréal

Alors, la promesse est-elle tenable pour Montréal ? Sur le papier, oui. La ville a commencé à implanter des mesures allant dans ce sens. Cependant, la fragmentation des interventions et l’immensité du réseau rendent la tâche colossale. La Vision Zéro n’est pas une baguette magique, mais un **engagement à long terme** qui exige des investissements massifs et, surtout, un courage politique pour parfois prioriser la sécurité sur la rapidité des déplacements motorisés. Elle ne devient une réalité que lorsque chaque réfection de rue, chaque nouveau projet immobilier, intègre ses principes dès la planche à dessin.

En fin de compte, la tenabilité de la Vision Zéro dépendra de notre capacité collective à accepter que la sécurité de tous les usagers est la mesure première de la performance de notre réseau routier.

Cyclistes, automobilistes : le guide de réconciliation pour un meilleur partage de la route

La « guerre » entre cyclistes et automobilistes est un mythe tenace qui masque une réalité plus simple : deux types d’usagers, avec des vitesses et des vulnérabilités différentes, sont contraints de partager un espace souvent mal conçu pour la cohabitation. La réconciliation ne passe pas par des excuses, mais par la connaissance mutuelle des règles du jeu et des caractéristiques de l’environnement. Le premier pas est de comprendre que le niveau de sécurité dépend directement du type d’infrastructure disponible, car toutes les « pistes cyclables » ne se valent pas.

Comprendre la typologie des aménagements est crucial pour adapter son comportement. Un cycliste sur une chaussée désignée doit agir différemment que sur une piste séparée, et un automobiliste doit redoubler de vigilance à l’approche d’une simple bande cyclable. Voici une comparaison pour clarifier les choses, basée sur les définitions du SPVM.

Types d’infrastructures cyclables à Montréal et leurs caractéristiques
Type d’infrastructure Caractéristiques Niveau de sécurité
Piste cyclable Séparée physiquement de la circulation motorisée par muret ou délinéateurs Élevé
Bande cyclable Délimitée par ligne de séparation, à droite des voies automobiles Moyen
Chaussée désignée Partagée avec automobilistes, signalée par panneau ou marquage au sol Faible

Au-delà de l’infrastructure, des gestes simples et des règles de base, souvent méconnus, peuvent désamorcer la majorité des situations à risque. La cohabitation apaisée est avant tout une question d’anticipation et de communication. Voici une checklist pratique pour auditer et améliorer son propre comportement sur la route.

Votre plan d’action pour un partage de la route sécuritaire

  1. Points de contact : Listez vos trajets quotidiens et identifiez les zones où vous interagissez le plus avec d’autres usagers (intersections complexes, zones scolaires, rues commerciales).
  2. Collecte des habitudes : Inventoriez honnêtement vos comportements à risque. Pour les automobilistes : oubliez-vous de vérifier l’angle mort avant un virage à droite ? Pour les cyclistes : grillez-vous les feux rouges ? Pour tous : pratiquez-vous la « Dutch Reach » (ouvrir la portière avec la main la plus éloignée) ?
  3. Cohérence avec la vulnérabilité : Confrontez vos habitudes au principe de protection du plus vulnérable. Votre vitesse en voiture est-elle adaptée à la présence de piétons ? En vélo, anticipez-vous les mouvements imprévisibles des enfants ?
  4. Lisibilité et prévisibilité : Évaluez si vos intentions sont claires pour les autres. Utilisez-vous vos clignotants systématiquement ? Faites-vous des signaux clairs à vélo ? Établissez-vous un contact visuel aux intersections ?
  5. Plan d’intégration : Choisissez une mauvaise habitude identifiée et engagez-vous à la corriger activement pendant une semaine. Par exemple, s’arrêter complètement au stop, ou attendre 5 secondes avant de démarrer au feu vert.

La sécurité est une responsabilité partagée, mais elle commence par une maîtrise individuelle des bons réflexes, adaptés à l’environnement dans lequel on évolue.

Le piéton, l’usager le plus vulnérable : comment rendre Montréal vraiment « marchable » ?

Dans l’écosystème de la rue, le piéton est au bas de la chaîne alimentaire. Sans carrosserie ni vitesse, il subit de plein fouet la **physique de la vulnérability**. Chaque collision, même à faible vitesse, peut avoir des conséquences dramatiques. Rendre Montréal « marchable » (walkable) ne consiste pas seulement à avoir de jolis trottoirs, mais à concevoir l’espace public en partant des besoins de la personne à pied. Or, certains aménagements semblent faire tout le contraire, notamment aux abords des grandes infrastructures routières.

Des données obtenues par Radio-Canada révèlent une réalité alarmante : 4 des 5 intersections les plus accidentogènes de la ville impliquent des voies d’accès de l’autoroute Métropolitaine. Ces lieux sont l’incarnation du design pensé pour la voiture, où le piéton doit traverser de véritables rivières d’asphalte avec des flux de circulation rapides et des conducteurs concentrés sur leur insertion autoroutière. La **lisibilité de la rue** pour un piéton y est quasi nulle, et le sentiment d’insécurité, maximal.

Piétons naviguant sur un trottoir enneigé avec bancs de neige aux intersections à Montréal

Ce défi est amplifié par la saisonnalité montréalaise. L’hiver, un trottoir mal déneigé, un banc de neige qui bloque une traverse piétonne ou une flaque de glace invisible transforment un trajet banal en parcours du combattant, particulièrement pour les aînés ou les parents avec poussette. Rendre la ville marchable, c’est aussi garantir **l’accessibilité et la sécurité 365 jours par an**. Cela passe par des actions concrètes : des politiques de déneigement qui priorisent les trottoirs et les traverses, des saillies de trottoir pour réduire les distances de traversée, et un temps de feu piéton suffisant pour que tous puissent traverser sans se presser.

Une ville véritablement marchable est une ville où l’option la plus simple, la plus saine et la plus économique pour se déplacer est aussi la plus sécuritaire. Montréal a encore du chemin à faire pour atteindre cet idéal.

Voir et être vu : l’équipement essentiel pour votre sécurité à vélo, de jour comme de nuit

S’équiper correctement à vélo n’est pas une coquetterie, c’est une nécessité vitale. C’est la première étape pour augmenter sa propre « lisibilité » dans le flux de la circulation et reprendre un certain contrôle sur sa sécurité. L’importance de la visibilité est particulièrement cruciale lorsque la lumière baisse, une période de la journée où le risque augmente de façon exponentielle. En effet, un guide de La Cordée sur la sécurité cycliste rappelle que plus du tiers des accidents mortels touchant les cyclistes surviennent la nuit, entre 18h et 6h.

Le Code de la sécurité routière du Québec est clair sur l’équipement minimal. Pour circuler la nuit, un **phare blanc à l’avant et un feu rouge à l’arrière** sont obligatoires, tout comme une série de réflecteurs (blanc à l’avant, rouge à l’arrière, sur les roues et les pédales). Mais se conformer à la loi n’est qu’un point de départ. Pour une sécurité optimale, notamment dans le contexte montréalais, il faut aller plus loin. L’objectif est d’être visible non seulement de face et de dos, mais aussi latéralement, point faible de nombreux cyclistes aux intersections.

L’hiver ajoute une couche de complexité. Le froid affecte les batteries, la neige et la gadoue peuvent masquer les lumières. Voici une liste d’équipements essentiels, incluant les spécificités hivernales, pour s’assurer d’être vu en toutes circonstances :

  • Éclairage adapté : Un phare avant d’au minimum 60 à 150 lumens est recommandé pour les rues éclairées, mais une puissance supérieure est nécessaire en zone sombre. Optez pour des batteries résistantes au froid ou facilement rechargeables par USB.
  • Pneus d’hiver : Indispensables pour l’adhérence, les pneus cloutés sont parfaits sur la glace, tandis que les pneus à crampons dégonflés légèrement offrent une meilleure traction sur la neige.
  • Protection contre les projections : Des garde-boue complets, fixés solidement, empêchent la neige et le calcium de recouvrir vos feux et votre dos.
  • Visibilité à 360° : Complétez vos feux avec des vêtements aux couleurs vives ou munis d’éléments réfléchissants, un couvre-casque voyant et même des lumières fixées sur le casque pour être visible au-dessus des voitures.

Cependant, il faut garder à l’esprit que l’équipement ne remplace jamais la vigilance. Il est un outil au service de votre **conscience situationnelle proactive**, vous rendant plus détectable par les autres usagers et vous permettant de mieux anticiper les dangers.

La carte des points noirs : voici les intersections les plus dangereuses de Montréal pour les piétons et cyclistes

Nous avons identifié les intersections les plus dangereuses de Montréal. Savoir où elles se trouvent est une chose; savoir comment les aborder en est une autre. Naviguer dans un de ces « points noirs » exige plus que de la simple prudence. Il faut adopter une **conscience situationnelle proactive**, une posture mentale qui consiste à analyser, anticiper et agir avant que le danger ne se matérialise. Il s’agit de traiter chaque intersection à risque non pas comme un passage obligé, mais comme une manœuvre tactique.

L’approche d’une intersection comme celle de Berri/Ontario ou Parc/Mont-Royal doit se décomposer en plusieurs étapes réflexes, que vous soyez à pied, à vélo ou en voiture. Premièrement, **réduire sa vitesse bien en amont**. Cela augmente votre temps de réaction et rend vos intentions plus lisibles pour les autres. Deuxièmement, **chercher activement le contact visuel**. Ne présumez jamais qu’un conducteur vous a vu. Cherchez son regard. Si vous ne pouvez pas le croiser, considérez que vous êtes invisible pour lui. Ce simple contact est une confirmation de communication non verbale qui peut sauver une vie.

Troisièmement, **anticiper les angles morts**. Un camion ou un autobus qui s’apprête à tourner à droite possède un angle mort immense sur son flanc. En tant que cycliste ou piéton, votre réflexe doit être de ne jamais vous positionner le long de ce véhicule à l’approche d’un carrefour. Restez derrière, bien visible dans ses rétroviseurs, ou passez loin devant. Enfin, **ne jamais présumer de sa priorité**. Même si votre feu est vert, scannez toujours les véhicules susceptibles de tourner ou de ne pas respecter leur signalisation. Le Code de la sécurité routière vous donne une priorité théorique; la physique d’une collision vous donnera toujours tort si vous êtes l’usager vulnérable.

CINQUIEME

Naviguer sur ces points noirs n’est donc pas une question de chance, mais de stratégie. C’est en comprenant et en anticipant les failles du design que l’on peut déjouer les pièges qu’il nous tend.

À retenir

  • La sécurité routière est moins une question de courtoisie que de compréhension du design urbain et de la physique.
  • L’identification des points noirs (intersections dangereuses) est cruciale pour adapter son comportement de manière proactive.
  • Chaque usager doit connaître les angles morts des autres et agir en conséquence pour rester visible et en sécurité.

Cyclistes, automobilistes : le guide de réconciliation pour un meilleur partage de la route

Au-delà des règles et des infrastructures, la réconciliation sur la route passe par une compréhension approfondie de la réalité physique et psychologique de l’autre. Deux concepts sont au cœur de la majorité des conflits et accidents évitables : les angles morts et l’effet de surprise lié à l’ouverture des portières. Les maîtriser transforme radicalement notre perception du risque et notre capacité à l’éviter.

L’**angle mort** n’est pas une excuse, c’est une contrainte physique. Pour un automobiliste, il est impossible d’avoir une vision à 360°. Pour un conducteur de camion ou d’autobus, ces zones d’invisibilité sont encore plus vastes. La responsabilité du cycliste ou du piéton n’est pas de blâmer le conducteur, mais de connaître ces zones pour ne jamais s’y placer. La règle est simple : **si vous ne pouvez pas voir les yeux du conducteur dans son rétroviseur, il ne peut pas vous voir**. Se positionner à l’avant ou loin derrière un véhicule lourd à un feu rouge, plutôt que sur son flanc droit, est une mesure de survie active.

L’autre point de friction majeur est l’**emportiérage**, principale cause d’accident entre vélos et voitures en stationnement. Là encore, une technique simple et efficace existe : la ** »Dutch Reach »** ou « portière à la hollandaise ». Elle consiste, pour le conducteur ou le passager, à ouvrir sa portière avec la main la plus éloignée (la main droite pour le conducteur). Ce geste force le corps à pivoter, orientant naturellement le regard vers l’arrière et dans l’angle mort, là où un cycliste pourrait surgir. C’est un exemple parfait d’une habitude simple qui, si elle était généralisée, relèverait de l’ingénierie comportementale et réduirait drastiquement ce type d’accident.

Pour que la cohabitation devienne une seconde nature, il est vital de bien intégrer ces mécanismes physiques et comportementaux dans sa routine.

Ces deux exemples montrent que la sécurité se niche souvent dans des détails techniques et des habitudes proactives, bien plus que dans de grandes déclarations d’intention.

Montréal à vélo ou en transports en commun : rêve ou réalité ? Le bilan de la mobilité durable

Aspirer à une ville où le vélo et les transports en commun sont les modes de déplacement privilégiés est un rêve partagé par beaucoup. L’engouement est bien réel, comme en témoignent les données détaillées des déplacements BIXI, mises à disposition par la Ville de Montréal, qui montrent une utilisation croissante année après année. Cette popularité, combinée au réseau de métro, de bus et maintenant du REM, dessine les contours d’une mobilité véritablement durable et intermodale. Le « rêve » d’une ville moins dépendante de l’auto solo prend forme.

Pourtant, pour que ce rêve devienne une réalité quotidienne confortable et choisie par le plus grand nombre, une condition non négociable doit être remplie : la sécurité. Un réseau de transport en commun performant et des centaines de kilomètres de pistes cyclables ne valent rien si l’usager se sent en danger pour se rendre à la station de métro ou sur le dernier kilomètre de son trajet. La **fluidité du parcours intermodal** dépend directement de la sécurité perçue et réelle de chaque maillon de la chaîne.

Station BIXI près d'une entrée de métro avec cyclistes et usagers du transport en commun

Le bilan est donc nuancé. Montréal a posé des jalons impressionnants pour sa mobilité durable. L’image d’un usager prenant son BIXI pour rejoindre une station de métro est devenue banale. Mais cette réalité cohabite avec celle des points noirs, des infrastructures manquantes et d’un sentiment d’insécurité persistant. La transition ne sera complète que lorsque la **sécurité systémique**, infusée par les principes de la Vision Zéro et une conception intelligente de l’espace public, deviendra le socle sur lequel repose l’ensemble du réseau. Le véritable succès se mesurera non pas au nombre de kilomètres de pistes, mais au nombre de parents qui se sentent en confiance de laisser leurs enfants se déplacer seuls en ville.

Pour faire de chaque déplacement un acte sécuritaire, la première étape consiste à auditer vos propres trajets et comportements à la lumière de ces réalités urbaines, et à transformer la connaissance du risque en une pratique constante de l’anticipation.

Rédigé par Olivier Bouchard, Cycliste quatre-saisons et militant pour la mobilité active depuis 7 ans, Olivier Bouchard explore et documente les meilleures façons de vivre la ville sans voiture. Son expertise couvre autant les infrastructures cyclables que les activités de plein air urbain.